Histoire du Saint Curé d’Ars

Ce dimanche 4 Août 1912 il pleut sur le Plateau de Bicêtre.

Colline jadis bucolique dominant la Bièvre, le quartier est devenu depuis quelques années un paysage désolé couvert de cabanes éparpillées, frêles maisons de planches où s’entassent des familles chassées de la capitale par la cherté de la vie. Le cortège qui s’avance sur le chemin boueux, accompagné d’enfants qui portent des drapeaux tricolores et des oriflammes, est conduit par l’Archevêque de Paris, le cardinal Amette qui vient bénir une nouvelle chapelle dans la Banlieue de Paris.

Un an et demi auparavant, le 31 décembre 1910, la Préfecture de la Seine a enregistré la déclaration d’une bien étrange Association : « l’Association de Bienfaisance du plateau de Bicêtre » qui a pour objet de soutenir l’action de l’Eglise catholique sur le quartier. Elle est présidée par le commandant de la Blanchardière entouré par des personnalités de la société parisienne.

En réalité, sans le dire, cette association n’a qu’un but : permettre dans ces années agitées de séparation de l’Eglise et de l’Etat, de bâtir des nouveaux lieux de culte en toute sécurité juridique.
Rapidement l’association rassemble des fonds grâce à des dons généreux, achète un terrain le long de la « voie aux ânes », contacte un emprunt et commande les travaux. Le temps presse, le chanoine Roland-Gosselin pose la première pierre en février 1911 et dès le mois de novembre suivant, l’édifice, construit sur les plans de l’architecte Jacquemain, est achevé.
En haut de la façade en brique, on a installé « Marguerite-Marie », la cloche.
Le père Aigouy, curé du Kremlin-Bicêtre, au retour d’un pèlerinage à Ars au cours de l’été 1910 a l’idée de créer dans le quartier du Plateau une œuvre religieuse, éducative et sociale pour venir en aide aux premiers habitants du Plateau. Par une permission spéciale du Pape, la bénédiction du quartier du 4 août 1912 est l’occasion de consacrer ce nouveau lieu de culte au curé d’Ars, le bienheureux Jean-Marie Vianney. Cette nouvelle réalisation complètera le travail entrepris depuis quinze ans sur le bas de Bicêtre en faveur des pauvres.

Le 4 août 1912 le baptême de la Chapelle du curé d’Ars constitue donc pour le Père Aigouy la consécration d’une nouvelle étape de son aventure opiniâtre de bâtisseur de la banlieue.
Très rapidement l’œuvre du Plateau connaît un intense développement.
Dans les salles attenantes à la chapelle, on installe une école de filles, puis une école de garçons et un dispensaire qui en hiver se transforme en réfectoire pour accueillir les enfants déshérités du quartier.

A partir de 1930, le développement du dynamisme social, religieux et missionnaire est tel qu’il suppose de nouveaux investissements.
Le 30 octobre 1932, la chapelle, agrandie en profondeur et en largeur grâce aux Chantiers du Cardinal récemment créés, et à une nouvelle souscription, est bénie par le cardinal Verdier.

En 1934 l’ensemble paroissial s’agrandit d’un nouveau terrain au Bas Martinets, ce qui permet de développer les infrastructures pour le patronage : bibliothèque, théâtre, salles d’activités et de gymnastique. Elle se dote aussi d’une colonie de vacances à Noirmoutier, grâce à la générosité du Père Pluyette. Des milliers de petits Kremlinois du Plateau iront y passer des séjours à la mer.

En 1934 l’ensemble religieux est érigé en Paroisse de plein exercice.
Jusqu’à la fin des années cinquante, la paroisse du Saint Curé d’Ars soutenue par les journaux qu’elle édite (« L’effort » puis « l’Union du Plateau) » connaîtra une vigoureuse activité, marquant durablement la vie du quartier et de ses habitants. A partir de 1960, la paroisse rencontre ses premières difficultés. Confrontée à la dégradation des bâtiments et au fléchissement de l’activité du patronage, l’ABPB commence à vendre des terrains pour financer les travaux d’entretien.
Vers 1975, la situation a atteint un stade d’extrême délabrement.
La petite chapelle agrandie en 1932 n’en peut plus d’être réparée, les trous dans la charpente laissent passer la pluie, les orgues offertes par le Père Aigouy ont disparu et la structure du bâtiment, minée par le vieillissement du béton armé laisse paraitre des fissures inquiétantes.
La cloche Marguerite-Marie a dégringolé un jour d’orage.
En soixante-dix-ans le quartier a beaucoup changé, au paysage misérable du début du siècle, a succédé un habitat diversifié constitué d’une zone pavillonnaire, d’une cité militaire autour du fort et d’un grand ensemble de logements. Les activités se sont arrêtées progressivement au fur et à mesure que les équipements municipaux se développaient.
La grande sécheresse de 1976 provoque des fissures dans la façade.
Après de très nombreux projets et des réunions très animées au sein de l’ABPB toujours propriétaire des locaux, en 1985 un programme de rénovation est adopté en assemblée générale. Il prévoit la destruction des anciens bâtiments et la reconstruction d’un ensemble paroissial. Le financement est assuré par la vente de la colonie de Noirmoutier, la cession d’une partie du terrain au « Mouvement d’aide au logement » pour construire un immeuble avenue Charles Gide et par une subvention des Chantiers du Cardinal. Avant la destruction de l’ancienne Eglise, des témoignages du passé sont conservés pour les replacer dans le nouvel édifice : les belles toiles de René Olivier, le beau Christ, la statue du Curé d’Ars, les vitraux et la cloche. La construction est assurée par les architectes Alain Mugniery et Michel Denis. La première pierre est posée aux Rameaux en 1987 et le 20 Mars 1988 le Père Fretellière, évêque de Créteil, célèbre la première messe dans la nouvelle Eglise.
« Marguerite-Marie » replacée dans le clocher peut appeler joyeusement les fidèles aux offices. A ses côtés, « Marie-Léonie », celle-là même qui sonnait au clocher de la chapelle de l’école Jeanne d’Arc, que l’on a opportunément retrouvée par hasard et qui symbolise ainsi la continuité de l’œuvre de Martial Aigouy et son renouvellement pour les temps futurs.
En 1996, l’Association de Bienfaisance du Plateau de Bicêtre remet la propriété de l’ensemble paroissial à l’Association Diocésaine de Créteil.

La voie aux ânes…un chemin boueux

La Chapelle du Saint Curé d’Ars

L’ensemble paroissial

L’atelier d’ apprentissage

L’école

Colonie de vacances à Noirmoutier

Les logements sociaux

La démolition